Une seule question : après avoir lu ces posts, est-ce que quelqu’un parmi vous achètera un document de Nouvelle-Calédonie pour sa bibliothèque ?
Dites oui, s’il-vous-plaît 😉
La bibliothèque Bernheim, son histoire
La bibliothèque Bernheim est un « établissement public de Nouvelle-Calédonie » dont le champ de compétences couvre l’ensemble du territoire de la Nouvelle-Calédonie. Elle a été créée en 1905, à la suite du don de Lucien Bernheim, propriétaire d’une mine à Népoui. A la veille de son départ pour la Métropole, ce dernier a souhaité doter la Nouvelle-Calédonie d’une bibliothèque. Dans sa lettre au gouverneur, il explique comment il imagine l’établissement et fixe les missions qui sont encore celles de la bibliothèque aujourd’hui.
Monsieur le Gouverneur,
Au moment de quitter la colonie, probablement pour n’y plus revenir, j’ai pensé à laisser à la Nouvelle-Calédonie, que j’aime, et dont je ne me sépare qu’avec peine, un gage d’affection en même temps qu’un souvenir durable de mon séjour ici. […] L’absence d’une bibliothèque se fait vivement sentir, et après y avoir mûrement réfléchi, c’est à la création d’une bibliothèque publique que je me suis arrêté. J’ai donc décidé de donner à la colonie, pour la fondation de cette œuvre et sous les conditions ci-après, une somme de cent mille francs que, si elle est acceptée, je verserai au Trésor colonial dans le courant du mois de janvier prochain. Cette bibliothèque portera mon nom. Elle sera installée dans le pavillon de l’Exposition de 1900 et sera à la fois destinée à la lecture sur place, et, pour les volumes dont la valeur n’est pas trop considérable, au prêt à domicile. (…) En outre, je désire que la colonie profite de cette bibliothèque. En conséquence il serait nécessaire d’organiser un système de circulation de livres (…) Je pense que la colonie pourra prendre en charge les autres frais, peu élevés, qui résulteront du fonctionnement de cette bibliothèque qui assurera à mes concitoyens de la Nouvelle-Calédonie un puissant moyen de culture intellectuelle. […]
Patrimoine, communication des ouvrages, décentralisation ont ainsi fait partie des finalités de la bibliothèque dès sa création en 1905. A son ouverture, elle est installée dans le pavillon de la Nouvelle-Calédonie de l’exposition de 1900, qui a été démonté et ramené à Nouméa. Sa charpente métallique, apparente, a été réalisée par Gustave Eiffel. A cette date, les collections sont conservées au rez-de-chaussée et l’étage fait office de musée. En 1981, un second bâtiment sera construit pour pallier le manque de place.
La bibliothèque se compose aujourd’hui du pavillon Eiffel, qui accueille les expositions et abrite la salle des périodiques. Dans le bâtiment qui lui fait face sont conservées les collections adulte et jeunesse, ainsi que la discothèque.
Missions
La bibliothèque Bernheim possède le statut d’ « établissement public de Nouvelle-Calédonie », à savoir que son champ de compétences couvre l’ensemble du territoire. Outre la desserte municipale qu’elle assure du fait de sa position en plein centre de Nouméa, il lui incombe plusieurs missions.
La première d’entre elles est une mission de lecture publique pour laquelle elle constitue des collections pluralistes et encyclopédiques, destinées à l’ensemble des publics, à des fins d’information, de formation permanente, d’enrichissement culturel et de loisirs. Elle réalise aussi la promotion de la lecture en organisant fréquemment des animations. En outre, elle pilote le Réseau Documentaire Calédonien, REDOCAL, qui permet d’accéder en ligne aux ressources de dix-sept établissements répartis sur l’ensemble de la Nouvelle-Calédonie. La décentralisation s’inscrit dans le développement de la lecture publique en Nouvelle-Calédonie. Voulue par Lucien Bernheim, la desserte d’une majorité d’habitants est aujourd’hui assurée par les bibliothèques. Un secteur spécifique existe au sein de deux des établissements du réseau.
Une autre des missions de la bibliothèque consiste à collecter et conserver le patrimoine imprimé, iconographique et sonore. Pour ce faire, elle est dépositaire du dépôt légal, éditeur et imprimeur, pour la Nouvelle-Calédonie et Wallis-et-Futuna, et elle fait partie des pôles associés de la BnF. Un pôle associé peut être défini comme un « ensemble documentaire organisé autour d’un site géographique cohérent, doté de la personnalité juridique et de l’autonomie financière, s’efforçant de développer une spécialisation en renforçant ses collections en harmonie avec celles de la BnF »1.
Fonctionnement de l’établissement
Une cinquantaine de personnes travaille pour la bibliothèque Bernheim. Trente travaillent sur le site historique tandis que dix sont affectées à la gestion de la médiathèque du Nord, à Poindimié, également gérée par Bernheim. Enfin, une dizaine de personnes viennent d’être recrutées afin d’assurer la création de la future médiathèque VKP2 qui sera située, en province Nord, à Koné. En effet, pour assurer la promotion de la lecture publique, la province Nord a fait le choix de confier les projets de création de médiathèques (Poindimié puis VKP), ainsi que leur gestion, à la bibliothèque Bernheim. Il s’est créé une véritable synergie entre les établissements. Si les compétences de la bibliothèque sont territoriales, son financement, comme celui de l’ensemble des institutions culturelles, échoit à chacune des trois provinces de Nouvelle-Calédonie.
1 In Bertrand CALENGE, Conduire une politique documentaire. Paris : éditions du Cercle de la Librairie, 1999, p. 58.
2 Sigle pour les communes de Voh, Koné et Pouembout qui seront desservies par cet établissement.
Argh! Tu ne dis même pas qu’ils ont Koha!
A l’époque où j’ai écrit ça, ils ne l’avaient pas encore…
Un billet à venir 😉
Pssst ! J’en ai parlé dans le billet précédent : lecture publique en NC, bilan.
Et je ne m’en souvenais même pas, c’est M. Gougleuh qui l’a retrouvé…
Acheter des livres venus de là-bas. Pourquoi pas ? A vrai dire, je voulais le faire et d’ailleurs il y a un dossier Citrouille sur la littérature jeunesse en NC. Mais voilà, je doute que mon libraire fournissent aisément les livres édités par Grain de sable ou par l’ADCK.
J’ai une question à propos du réseau de bibliothèque Calédonien. Vous parlez de Bernheim, de la bibliothèque de Poindimié et d’une future bibliothèque dans le Nord sur la Cote Ouest. Ce que j’aimerais savoir, c’est l’état du réseau en dehors de ces bibliothèques? quelle présence de bibliothèques municipales en dehors des trois principales « agglomérations » ? Quelles actions des bibliothèques pour amener le livres en tribu ? …
Les ouvrages de Grain de sable se trouvent dans Electre 🙂 Je vérifie demain pour l’ADCK. Il me semble que si votre fournisseur habituel n’est pas en mesure de vous fournir un document, vous pouvez le commander hors marché (voir Pacific Book’in qui diffuse les ouvrages du Pacifique).
Le réseau se compose de 17 bibliothèques : vu la taille du pays et son nombre d’habitants, c’est un nombre conséquent. Tous les établissements ne sont pas aussi bien équipés que Poindimié et Nouméa mais il faut savoir que ces deux principales bibliothèques du pays font aussi fonction de BDP : elles ont des collections réservées à la desserte des bibliothèques du réseau. Donc, même si l’établissement est petit, sa collection ne l’est pas !
Je n’ai pas travaillé sur la lecture en tribu mais je peux vous dire qu’il existe des points-lecture en tribu. Il existe un mémoire ENSSIB sur le sujet :
http://www.enssib.fr/bibliotheque-numerique/document-824
Par ailleurs, tous les enfants sont scolarisés (la scolarisation date d’après la seconde guerre mondiale quand les Kanak ont obtenu la citoyenneté française) et ils empruntent beaucoup de livres du CDI : les livres arrivent donc à la tribu aussi par ce biais-là. J’ai été élève dans un lycée de brousse, en section littéraire : je suis retournée en Nouvelle-Calédonie récemment et plusieurs de mes amies du lycée sont devenues bibliothécaires comme moi ! Certaines sont dans des grosses structures, d’autres animent des points-lecture. Pour conclure, je dirais que, pour ce qui est de ma génération, je crois que la lecture fait déjà partie de la tribu.
Et j’oubliais : le fait d’avoir délocalisé le salon du livre à Poindimié, en brousse, sur la côte Est, a été un geste très fort pour montrer que la lecture n’est pas réservée à ceux de la capitale.
Por que no:)