Le palais des congrès de Lyon. Par Flexikon (Own work). CC-BY-SA-3.0, via Wikimedia Commons |
Cette journée d’étude a eu lieu le 9 novembre à Me-diadix, voici quelques notes prises par ma collègue Laurence Jonard et moi.
L’IFLA, la voix des bibliothèques dans le monde : stratégie, engagements, activités majeures, par Pascal Sanz, président du Comité français international bibliothèques et documentation (CFIBD)
Le CFIBD, le comité français international bibliothèques et documentation, est une association de loi 1901 dont le but est de coordonner les actions internationales des bibliothèques à l’étranger. Son rôle est aussi d’aider les professionnels à participer à des congrès internationaux comme celui de l’IFLA.
L’IFLA, International federation of libraries associations, fédération internationale des associations de bibliothécaires et des bibliothèques en français, est une institution des associations de bibliothécaires, avant d’être celle des établissements. L’IFLA est la voix mondiale des bibliothèques et des professions de l’information. C’est la principale organisation représentant les intérêts des bibliothèques et des services d’information et de leurs usagers. Elle est le porte-parole des institutions au niveau mondial, son action se traduit par un lobbying continuel. C’est un organisme qui existe depuis 1927, avec 1600 membres répartis dans 150 pays. Parmi ces membres, qui peuvent paraître peu nombreux de prime abord, beaucoup sont en réalité des associations regroupant de nombreux professionnels.
L’IFLA s’intéresse à tous les types de bibliothèques et services d’information. Elle se caractérise par la grande diversité de ses terrains d’actions et de ses centres d’intérêt.
Organisation : une assemblée générale, un conseil d’administration élu pour deux ans, un comité exécutif (extraction du CA), un comité professionnel pour les contenus professionnels (qui s’occupe notamment des congrès, des contenus, etc.).
L’IFLA est composée de très nombreux groupes, des comités permanents, mais également des groupes d’intérêt particuliers et des programmes stratégiques. On peut citer notamment le comité sur le droit d’auteur et les questions juridiques, le comité sur la liberté d’accès à l’information, le comité sur les normes (l’IFLA a une délégation de l’iso pour les normes).
L’IFLA a un plan stratégique pour 2010-2015, avec des initiatives clés : donner aux utilisateurs des bibliothèques un accès équitable à l’information ; faire entendre la voix des professionnels ; assurer un plaidoyer en faveur de la profession ; programme de reconstruction du patrimoine ; assurer le multilinguisme de l’organisation (sept langues officielles).
Le président est élu pour deux ans et il porte une thématique, qui sera un axe d’action durant son mandat. Les présidents ont la particularité d’être élus deux ans en avance. C’est un fonctionnement très intéressant car le président élu et le président en exercice travaillent ensemble, le premier se forme au contact du second. La coopération et le travail en commun en sont renforcés. Le « thème présidentiel » existe depuis dix ans. Actuellement, il s’agit de : « Des bibliothèques fortes pour des sociétés fortes ».
L’IFLA travaille en réseau avec d’autres associations mais aussi avec d’autres professions, éditeurs, musées, etc. On peut en outre souligner son action aux côtés du Bouclier bleu.
L’IFLA produit un certain nombre de manifestes. L’organisation s’est par exemple fait le porte-parole principal du traité des exceptions et limitations au droit d’auteur pour les bibliothèques et les archives.
Trend report, en français rapport de tendances, est une plate-forme créée sous l’impact des nouvelles technologies. Le dispositif est interactif et il est constitué de questionnements qui interpellent le grand public et les professionnels.
Cinq tendances :
– Les nouvelles technologies vont en même temps étendre et restreindre l’accès à l’information en fonction des publics concernés.
– Les cours en ligne vont aussi bien démocratiser que bouleverser l’enseignement au niveau mondial.
– Les frontières autour de la vie privée et la protection des données personnelles doivent être redéfinies.
– Dans ces sociétés hyper-connectées, de nouvelles voix et de nouveaux groupes vont émerger pour s’emparer de problèmes sociaux ou politiques à travers des actions collectives et de nouveaux médias.
– Les nouvelles technologies vont transformer l’économie mondiale : de nouveaux modèles économiques vont s’imposer à travers structures innovantes (e-commerce, mobilité, etc.).[1]
L’IFLA et ses congrès : un centre de ressources pour les professionnels des bibliothèques, une chance pour la lecture publique, par Philippe Colomb (Bibliothèque publique d’information)
Les congrès de l’IFLA constituent un centre de ressources pour les professionnels des bibliothèques. Ils permettent de rencontrer des professionnels avec qui on partage un certain nombre de valeurs et d’échanger avec des collègues du monde entier.
Les congrès sont annuels et ils abordent des sujets aussi divers que les normes, les missions et les publics, la compréhension de la société de l’information, la cohésion d’une communauté des bibliothécaires.
Le congrès est l’occasion d’avoir une mise en perspective mondiale, il permet de construire une communauté internationale de bibliothécaires.
La question des normes fait partie des activités fondamentales, notamment en ce qui concerne les normes de catalogage, l’évaluation et les statistiques. Ce n’est pas un comité Théodule ! Il est également question de l’accessibilité. Ce groupe de travail a un rôle très important.
L’IFLA a pour mission de conceptualiser le rôle des bibliothèques dans la société. Dans ce cadre, le comité FAIFE, auquel Philippe Colomb appartient, défend la liberté d’expression et l’accès à l’information. Il est à l’origine du manifeste internet en bibliothèques et sert d’appui aux bibliothèques dans beaucoup de pays où une censure est exercée. Le comité a aussi développé un code d’éthique, son cadre sert de base et de langage partagé pour les professionnels.
Les comités et les groupes de l’IFLA travaillent en outre sur la question des publics spécifiques : publics en situation de handicap, enfants, multiculturalisme, LGBTQ. Philippe Colomb est revenu notamment sur un aspect qu’il juge important, particulièrement pour les Français, à savoir la question du multiculturalisme. Il est nécessaire d’aborder la présence du multilinguisme et du multiculturalisme en bibliothèques.
Il est nécessaire de souligner que l’IFLA est sous-tendue par une volonté forte de comprendre la société de l’information et de dépasser le cadre strict du métier. Beaucoup d’autres gens traitent ce sujet dans un but mercantile, sans pour autant qu’il soit négatif. A titre d’exemple, on peut citer l’affaire Google. Lors d’un congrès, l’IFLA avait invité un des responsables l’entreprise à s’exprimer. L’IFLA a aussi reçu en congrès des membres des partis pirates. Il s’agit d’être dans un débat public serein.
Le congrès 2013 s’est déroulé à Singapour, qui n’est pas vraiment un modèle en matière de liberté d’expression. L’IFLA a invité un des blogueurs les plus connus de Singapour sur la question de la censure pour qu’il puisse s’exprimer. Il règne là-bas un flou total sur les contenus de l’interdit et il est difficile de savoir si ce qu’on va écrire sera condamnable ou pas. Les condamnations prononcées sont peu nombreuses mais très fortes. Il en découle une autocensure des gens qui n’écrivent plus.
L’IFLA mène une action de lobbying en participant aux négociations de l’OMPI. L’organisation est présente sur la question de la liberté d’expression. Il s’agit de porter la voix des bibliothécaires à la mesure de ses moyens dans le plus d’organismes possibles.
Philippe Colomb a souligné que son implication dans l’IFLA lui a permis de partager avec d’autres collègues les raisons pour lesquelles on fait un métier, quels sont ses objectifs et ses valeurs. C’est une activité qui sort des contingences professionnelles. Il s’agit de se dire qu’on participe à un mouvement global en faisant ses choix quotidiens.
Le Congrès IFLA en France en août 2014, de l’idée à la réalité : le rôle des différents acteurs, par Pascal Sanz
Pascal Sanz a expliqué les démarches engagées lors de la candidature de la ville de Lyon pour le congrès 2014. Il a également précisé les grandes lignes de l’organisation de l’événement qui dure une semaine.[2]
La France n’avait pas accueilli le congrès de l’IFLA depuis 1989. A cette époque, huit ans après l’élection de la gauche, l’accès à la culture s’était démocratisé et la période était très porteuse pour recevoir des collègues du monde entier. Vingt-cinq ans plus tard, il a semblé nécessaire de témoigner de l’évolution des bibliothèques en France mais aussi d’inciter les collègues français à pouvoir assister à un congrès à moindres frais.
L’Île-de-France représentant un tiers du potentiel documentaire du pays, Paris aurait donc été un choix attractif mais il n’était pas bon pour la candidature de la France de proposer la même ville. Lyon s’est imposé pour son attractivité.
Participer à l’IFLA : pourquoi pas vous ?
Table ronde animée par Christophe Pavlidès, avec Céline Huault, boursière du CFIBD à l’IFLA 2012 et Julien Sempéré (SCD Paris Descartes), boursier du CFIBD à l’IFLA 2013
Le Cfibd offre des bourses pour le WLIC (World Library and Information Congress).
Céline Huault a expliqué qu’elle avait découvert l’IFLA par le manifeste. Elle s’est ensuite inscrite aux listes de diffusion (une par section), dont certaines ne demandent pas d’être membre[3], ce qui lui a permis de se familiariser avec les travaux de l’association.
Elle a ensuite proposé une communication pour le congrès d’Helsinki. Des appels à communication réguliers sont effectués pour chaque congrès. Elle a également réalisé des posters dans le cadre d’appels à posters. Enfin, elle a participé à un des projets lancés par l’IFLA autour des bibliothèques de rue.
Alors qu’elle travaillait au Togo à l’époque, elle a demandé une bourse auprès du CFIBD, qu’elle a obtenue. Le congrès est l’occasion de faire des rencontres avec des professionnels de tous horizons. Elle a aussi rappelé l’importance des visites des bibliothèques de la ville du congrès pour découvrir des pratiques professionnelles et échanger autour de celle-ci.
Elle est désormais élue dans un des comités permanents et est devenue traductrice des travaux de l’IFLA, dont elle souligne la richesse du site.
Julien Sempéré a expliqué avoir toujours beaucoup de curiosité pour l’international depuis qu’il est étudiant. C’est lors d’un stage à l’étranger qu’il a rencontré une collègue qui lui a parlé de l’IFLA, afin de ne pas perdre le contact avec l’étranger.
Se passionnant pour la question du knowledge management[4], il est devenu membre du comité permanent sur le sujet. Pour devenir membre, il faut être parrainé. Le comité est composé de personnes d’horizons variés, qui ne sont pas toutes bibliothécaires. Comme le congrès a lieu l’an prochain, il est responsable d’un satellite meeting, une journée d’étude, sur le thème du knowledge management.
Julien Sempéré considère que son expérience à l’IFLA apporte des méthodes de travail auxquelles on n’est pas habitué. Il pense acquérir de nouvelles façons de travailler. Il précise toutefois qu’il faut être prêt à s’impliquer en dehors des heures de travail, à y consacrer un certain nombre de soirées et de week-ends.
Céline Huault explique qu’on peut avoir le statut d’observateur dans les standing committees. Un tour de table a lieu lors de chaque réunion. A partir du moment où on manifeste un intérêt et où on a envie de s’impliquer, il est possible d’y prendre part.
Il y a de la place pour les nouveaux arrivants et les membres de l’IFLA ont le souci d’intégrer les nouveaux professionnels. Intérêt et réceptivité, dynamisme sont les qualités recherchées au sein de groupes où tout le monde a son mot à dire à égalité.
Julien Sempéré évoque la question de la transmission de culture : il faut qu’il y ait des piliers qui soient là depuis longtemps pour transmettre les connaissances à ceux qui intègrent l’IFLA.
Il précise que dans les standing committee, les membres ne se voient qu’une fois par an lors d’une sorte de CA. Le reste du temps, le travail est réalisé à distance en anglais.
Lors du congrès, il est intéressant d’aller aux sessions ouvertes qui croisent les questions abordées par les comités. Ces sessions sont ensuite traduites.
Christophe Pavlides, est-ce que l’IFLA est connecté au quotidien professionnel ?
Céline Huault explique que les projets qu’elle a conduits avec l’IFLA lui ont donné envie de rediffuser l’information. Assister à un congrès, c’est aussi retransmettre aux collègues. En tant que boursier, précise-t-elle, un compte-rendu est de surcroît demandé. Elle ajoute que le congrès est très dense et qu’il permet de prendre des contacts et les utiliser par la suite.
Julien Sempéré explique pour sa part qu’il ne prend pas le temps d’aller en formation durant l’année universitaire, alors qu’il y envoie des gens de son équipe.
Le comité IFLA l’oblige à s’auto-former, cela crée une dynamique et l’oblige à un rythme de travail. Cette action crée une formation en retour, lui permettant de se perfectionner sur des sujets qui l’intéressent pour son travail. Il échange ensuite avec les collègues intéressés. Pour lui, c’est une ouverture d’esprit qui lui servira sans doute un jour même si ce n’est pas immédiat.
Il est enfin extrêmement intéressé par la réflexion à l’IFLA sur la carrière, sur les possibilités de reconversion et d’ouverture par rapport à la carrière. Alors que ces sujets ne sont jamais abordés dans le cadre de la fonction publique dans l’Hexagone, ils préoccupent les collègues étrangers.
A l’issue de la table ronde, Pascal Sanz, président du CFIBD, a donné des informations sur l’inscription au congrès et sur les possibilités d’obtenir des bourses. Pour être congressiste, il faut évidemment s’inscrire. Le tarif est 475€ avant le 15 mai, il augmente ensuite.
Un appel à candidature pour les bourses du CFIBD est lancé chaque année, en décembre/janvier. Il faut renvoyer une lettre de motivation ainsi qu’un dossier. Il faut essayer de montrer qu’on n’a pas seulement envie de découvrir ce qu’est l’IFLA mais surtout qu’on y participe activement, par exemple en étant élu, en ayant présenté une communication. Il faut montrer qu’on est prêt à faire un travail, qu’on a un vrai intérêt. Pour les nouveaux, l’aspect découverte est tout de même pris en compte mais ce n’est pas le seul critère.
Pour les collègues français, le CFIBD attend que l’établissement paie l’inscription à son agent. Le reste des frais, voyage, hébergement, est couvert par le CFIBD par une somme forfaitaire. Pour les collègues étrangers des pays émergents, tout est pris en charge.
Le CFIBD assure une sorte de tutorat pour ses boursiers. Il leur fournit une sorte de mode d’emploi pour un congrès de cette ampleur (250 réunions, 400 communications scientifiques).
Les boursiers doivent faire un rapport et participer à deux traductions. Ils doivent aussi écrire dans le petit journal quotidien, IFLA express. Ensuite, il leur revient d’organiser la diffusion de ce qu’ils auront appris, notamment en produisant un article dans une revue professionnelle.
Le CFIBD attribue aussi des bourses pour Liber et pour Eblida.
Pascal Sanz a redit que l’IFLA recherchait l’amalgame, c’est-à-dire le mélange des anciens et des jeunes collègues pour la transmission des savoirs et des pratiques.
Accueillir les bibliothécaires du monde entier : l’organisation du congrès 2014 et l’enjeu des volontaires, par Elisabeth Lemau, coordinatrice nationale du volontariat IFLA Lyon 2014
L’organisation du volontariat pour le congrès est un enjeu très important. L’objectif est de participer à un projet national. Il s’agit de mieux connaître les associations et les bibliothèques de tous types.
Pour les volontaires, dont l’équipe sera internationale, donner de son temps peut déboucher sur un engagement professionnel.
Les tâches du volontaire consistent notamment à remplir les sacs des congressistes, mais aussi à accueillir et orienter ces derniers. Il s’agit aussi d’assister les officiels, les présidents de l’IFLA notamment, de traduire des articles pour la newsletter IFLA express, de guider les conférenciers et les interprètes, enfin d’accompagner les visites de bibliothèques.
Les contreparties pour les volontaires sont importantes. Ils bénéficient de l’inscription gratuite au congrès en échange de six demi-journées de travail. Ils sont invités à la soirée et l’hébergement d’une nuit sur les cinq ou six est pris en charge. Les déjeuners sur le temps de leur service sont également offerts. Enfin, ils se voient remettre un certificat de volontaire IFLA.
Les qualités requises sont assez classiques, accueil et organisation, goût pour le travail en équipe, connaissance d’une ou plusieurs langues étrangères (anglais mais aussi autres langues de l’IFLA), capacité d’adaptation à différents postes et activités, ouverture vers d’autre cultures. La connaissance éventuelle du fonctionnement de l’IFLA est appréciée.
La procédure est détaillée sur le document d’appel au volontariat. A la suite des candidatures, des tests de langue par téléphone auront lieu à partir du mois de décembre.
Pour proposer leurs candidatures, les éventuels volontaires sont invités à adresser leurs CV à l’adresse suivante : volontaire.wlicifla2014@gmail.com.
[1] Pour aller plus loin, voir le billet du blog Prospectibles.
[2] La vidéo promotionnelle du congrès a été projetée : http://vimeo.com/49155275
[3] Il faut noter que toute personne membre d’une association professionnelle affiliée à l’IFLA, l’ABF par exemple, est considérée comme membre de l’IFLA. Elle doit faire la demande de codes auprès de son association professionnelle.
[4] Méthodes et outils logiciels permettant d’identifier, de capitaliser les connaissances de l’institution afin notamment de les organiser et de les diffuser.