En février, j’ai assisté à la conférence « Des livres aux machines« , organisée par la BPI, avec Alain Giffard, Frédéric Kaplan et Etienne Mineur. La rencontre était animée par Hubert Guillaud. Ce jour-là, j’avais oublié mon netbook et je n’avais pas non plus beaucoup de papier dans mon sac à main. Je n’ai donc pris que quelques rares notes sur mon téléphone. Ce n’est pas bien grave puisqu’on peut réécouter/revoir la conférence.
Sur ce blog qui me tient lieu d’aide-mémoire, je voulais juste archiver quelques-unes des questions que je me suis posée sur la lecture, à la suite des propos de Frédéric Kaplan.
La lecture immersive, dont on nous vante tant les mérites aujourd’hui, n’a jamais que deux cents ans. C’est la lecture de roman qui lui tient lieu de modèle : une lecture isolée et exclusive.
La lecture qui se développe aujourd’hui est plutôt une lecture à la Montaigne, à sauts et à gambades : c’est une lecture encyclopédique. La lecture de l’encyclopédie, par le jeu des renvois, des index et des notes, a toujours obligé à une gymnastique intellectuelle, faisant passer d’une page à l’autre, d’un volume à l’autre, etc. L’encyclopédie a toujours battu en brèche les limites du livre papier. C’est cette pratique-là qui réapparaît sur l’internet.
Condamner cette pratique encyclopédique de la lecture sur le web est contre-productif. L’étudiant d’avant 1995 n’a-t-il pas lui aussi travaillé par rebonds pour n’importe quelle recherche ? tel élément en note de bas de page, telle référence dans la bibliographie n’amenaient-ils pas à aller chercher dans un autre ouvrage, dans un périodique, puis passer par un dictionnaire ou une encyclopédie pour vérifier ou approfondir une notion, et finalement être parfois emporté assez loin du sujet de départ ? La référence bibliographique, la note de bas de page sont les hypertextes d’hier.
Ces deux façons de lire peuvent très bien cohabiter à l’heure où les écrans prennent une place prépondérante dans la vie quotidienne. Clamer par contre que la lecture immersive est la seule valide reviendrait par contre à condamner à la méthode qui a toujours été celle du travail intellectuel depuis des siècles. Bref, la lecture hypertextuelle a de beaux jours devant elle…